Cyclo-cross: les courbes de forme de Wout Van Avert et Mathieu Van der Poel se croisent
- Publié le 18-12-2017 à 12h00
- Mis à jour le 27-02-2018 à 16h21
Pour la première fois cet automne, Wout Van Aert a surclassé Mathieu Van der Poel. Son premier succès à Namur est sa cinquième victoire de la saison. Ceux qui espéraient un nouveau duel aux couteaux entre Mathieu Van der Poel et Wout Van Aert, après l’épreuve d’Anvers, samedi, où les deux hommes s’étaient livrés à un combat acharné jusqu’en toute fin de course, en auront été pour leurs frais, ce dimanche à Namur.
Sur le magnifique et impitoyable circuit de la Citadelle, il n’y eut point de duel, en effet. La faute, non au Néerlandais, jusqu’alors l’ogre de la saison avec 18 victoires en 22 épreuves, mais bien au Campinois. Wout Van Aert s’est en effet porté au commandement d’emblée, dans cette 6e des neuf manches de la Coupe du Monde.
Tandis que son rival perdait régulièrement du terrain, multipliant chutes, glissades et fautes techniques, inhabituelles dans son chef, Van Aert a offert à ses supporters et au nombreux public enthousiaste un cavalier seul durant les neuf tours de la course.
"Un jour moindre sur ce circuit, ça fait tout de suite la différence", tentait d’expliquer le Belge après avoir entendu son adversaire, avant de répondre avec humour à la même question. "Non, moi non plus je n’étais pas dans un grand jour… Bien sûr, je me suis senti très fort. Il y a longtemps que je n’avais plus eu de telles sensations. Jusqu’ici, cette saison, j’étais chaque fois moins bien le deuxième jour (NdlR : le dimanche, après avoir déjà couru le samedi). Pour la première fois, cette année, j’étais encore mieux qu’hier à Anvers."
Où déjà Van Aert avait menacé jusqu’au bout Van der Poel. Il n’y a plus de doute, le coureur de Crelan-Charles est revenu en forme du stage effectué à Calpe.
"J’y ai bien travaillé, plus de deux semaines, notamment en côte, expliquait-il. J’ai perdu deux kilos. Pas de la graisse, hein, car je n’étais pas un gros sac. Ma masse graisseuse était de 6,3 %, c’est sans doute aussi de la masse musculaire qui a fondu et sur ce genre de circuit, cela paie évidemment."
Manifestement, le double champion du monde avait besoin de cette coupure, physiquement et mentalement. Elle va lui permettre d’aborder la seconde partie de saison au mieux. Sa victoire à Namur, sa première chez les élites dans la capitale wallonne, va lui apporter aussi un surcroît de confiance alors que se profile à l’horizon la très dense période de Noël et de fin d’année, avec ses nombreux cross.
"Je l’avais dit avant le week-end et je le répète, c’est un nouveau départ pour la saison", termina le porteur du maillot arc-en-ciel qui sera samedi à Saint-Nicolas, puis à la manche de Coupe du Monde de Zolder (le 26), avant Loenhout (28), Diegem (29) et Baal (1er janvier).
Sven Vanthourenhout, sélectionneur national : "Le retour du vrai Van Aert"
"Wout a gagné de manière impressionnante. Un tel solo montre que c’est le retour du vrai Wout Van Aert. Les quelques pour cent qui lui manquaient en début de saison, il les a récupérés. Car il n’y a pas de secret, pour gagner sur un parcours aussi dur que celui de Namur, il faut être à 100 % en ordre. C’est rassurant en vue du Mondial, qui aura lieu à Valkenburg sur un parcours similaire."
Van der Poel: "J’espère que ce n’est qu’un jour sans"
Mathieu Van der Poel ne cherche pas d’excuse à sa prestation en demi-teinte
Si samedi dans le sable des bords de l’Escaut, à Anvers, Mathieu Van der Poel avait prolongé sa belle série de victoires, portant le total de ses succès cette saison à dix-huit, en vingt-deux cross, le Néerlandais a subi le lendemain une nouvelle défaite qui aura peut-être des conséquences.
"Je ne crois pas que je doive me faire du souci en rentrant ce soir à la maison", tentait de minimiser le champion d’Europe, lequel avait été dominé de la tête et des épaules par Wout Van Aert, comme jamais encore cette saison.
La roue a-t-elle tourné ? Il est certainement trop tôt pour l’annoncer même si Van der Poel lui-même en convient : "On voit que Wout a bien travaillé durant son stage à Calpe." De fait, le coureur de Beobank-Corendon n’a pu s’imposer pour la troisième fois d’affilée, sur le circuit de la Citadelle.
"J’étais dans un mauvais jour, disait-il. Je suis enrhumé, mais je ne dois pas prendre cela comme excuse. J’espère simplement que ce ne sera pas plus grave et que dès la semaine prochaine, je pourrai de nouveau lutter à armes égales avec Wout et lui rendre la tâche plus difficile."
Après avoir multiplié les fautes techniques et même les chutes, Van der Poel a dû aussi accepter d’être devancé pour la deuxième place par Toon Aerts. Sa seule satisfaction aura été de conserver largement la tête du classement de la Coupe du Monde où, d’ailleurs, Wout Van Aert ne pouvait le dépasser. Septante points séparent désormais les deux adversaires alors qu’il reste trois manches à courir (Zolder, le 26, Nommay, le 21 janvier, et Hoogerheide, le 28).
"Je n’avançais pas aujourd’hui, reconnut encore l’ancien champion du monde. J’ai commis beaucoup d’erreurs, ce qui n’est pas mon habitude. Je suis même tombé contre un arbre à la fin, mais sans gravité, puis je n’arrivais pas à remettre mon pied dans la pédale. Mais deuxième ou troisième, ça ne change pas grand-chose. J’espère que ce n’est simplement qu’un jour sans, ça peut arriver. Ma saison a été très bonne jusqu’ici, mais, aujourd’hui, je ne pouvais pas concurrencer Wout. C’est un cross qui ne ment pas ! Il a eu une minute trente d’avance et si je finis à une minute, c’est parce qu’il s’est relevé sur la fin pour savourer son succès."
Pourtant, Van der Poel a apprécié sa journée en Wallonie.
"Il y avait énormément de public et d’ambiance, bien plus qu’il y a trois ou quatre ans, disait-il. Cela fait plaisir, c’est agréable de courir dans ces conditions."
Les réactions du côté belge
Toon Aerts : "Je suis content"
"Je suis content de ma deuxième place, expliquait Toon Aerts. Même si j’entends maintenant que Mathieu était dans un mauvais jour... (il sourit) Non, même si Wout était le plus fort, j’ai fait une belle course et l’écart qui nous sépare de Kevin Pauwels (4e) et des autres me conforte dans cette idée."
Plus de peur que de mal pour Vantornout
Pour Klaas Vantornout, le cross de Namur aura duré 150 mètres. Le double champion de Belgique a été la principale victime de la chute collective survenue au départ en milieu de peloton. Touché au bras gauche (poignet et coude), le Flandrien, qui arrêtera sa carrière en mars, a quitté la course. Les premiers examens n’ont toutefois révélé aucune fracture.
Les résultats dans les autres catégories
Les dames : un mauvais jour pour Cant
La spécialiste du mountainbike, la Britannique Evie Richards, 20 ans à peine, s’est imposée dans l’épreuve féminine. La 6e manche de la Coupe du Monde a été mise sur orbite par l’Italienne Eva Lechner, 2e l’an dernier à Namur, et l’Américaine Katherine Compton. Cette mise en route trop généreuse a forcé Lechner à lever le pied dans le dernier tiers de l’épreuve. Evi Richards s’est hissée au commandement et a pu entamer le final avec une avance de 10 secondes sur sa compatriote Nikki Brammeier. La jeune vététiste, championne du monde de cyclo-cross U23 en 2016, a tenu tête à toutes les tentatives de retour pour s’imposer en surclassement à la Citadelle. Le podium à Namur a été complété par la Britannique Nikki Brammeier et Lechner. La championne du monde belge Sanne Cant, à qui le circuit de Namur n’a jamais convenu, a dû se contenter de la 12e place. Elle a toutefois conservé son maillot de leader au général.
Les espoirs : le seul vrai duel du jour
S’il y eut ce dimanche un duel, c’est chez les espoirs qu’on l’a vécu, entre les deux ténors de la catégorie, notre compatriote Eli Iserbyt et le jeune Britannique Thomas Pidcock, finalement victorieux. "J’ai souffert avec le départ très rapide, disait le Flandrien. J’avais encore dans les jambes la course de samedi (NdlR : il avait gagné à Anvers, où Pidcock et la plupart des étrangers n’étaient pas au départ). Après j’ai trouvé mon rythme et j’ai fini par me retrouver en tête. Ensuite, j’ai malheureusement été victime d’une crevaison à l’arrière. On venait de passer le poste à matériel, ça a duré certainement un quart de tour, au moins cinq cents mètres et j’ai dû accepter son retour. Je pouvais encore rouler, mais je ne pouvais plus tirer sur mon vélo. J’ai perdu contact avec Pidcock quand je suis rentré dans le poste. Malgré mes efforts, je n’ai pas pu le rejoindre." Iserbyt reste leader en Coupe du monde, mais le classement est trompeur. "J’ai entendu que seulement quatre résultats (NdlR : sur sept courses) seront pris en compte, dit le Flandrien. Il a déjà gagné trois manches, moi une (à Zeven, en l’absence de Pidcock qui s’est imposé à Coxyde, Bogense et maintenant Namur). Il reste trois courses, il faudrait que je les gagne toutes… Ce sera dur, je ne trouve pas normal que toutes les courses ne soient pas comptabilisées. On dirait un classement pour débutants."
Namur restera en Coupe du Monde
Le cyclo-cross de la Citadelle de Namur a une nouvelle fois séduit. Le public, présent en masse (7.640 entrées, un record). Les coureurs également (du moins, pour ceux qui apprécient les tracés aussi durs !). Mais aussi l’Union Cycliste Internationale. Qui a confirmé ce dimanche à la société Golazo qu’elle acceptait sa candidature pour une nouvelle manche de la Coupe du Monde à Namur, en 2018. La date devrait être déplacée d’une semaine : la prochaine édition serait mise sur pied le 23 décembre 2018.